MOUDOUN : Un gâchis à 71 millions de dollars

Le Projet d’Appui à la Décentralisation et au Développement des Villes Intermédiaires Productives (MOUDOUN), financé à hauteur de 71 millions de dollars par le Gouvernement mauritanien et la Banque mondiale, devait être un levier majeur de développement local. Sur cinq ans (2020-2025), il couvrait sept villesRosso, Sélibaby, Kiffa, Aioun, Néma, Bassiknou, Adel Bagrou — ainsi que le camp de M’Berra.



Mais cinq ans plus tard, le bilan est consternant. Les réalisations sont insignifiantes, les fonds largement gaspillés, et le projet s’est transformé en une machine à décaissements sans résultats tangibles.

Après 18 mois d’inspection menée par l’IGE, le coordinateur général, Sid'Ahmed Bouceif, a finalement été démis de ses fonctions — une mesure attendue et justifiée. Cependant, réduire la responsabilité à une seule personne serait une erreur. Car derrière ce fiasco, se trouve un trio bien organisé :

  • Bouhebeyni, responsable de la passation des marchés ;

  • Saad Bouh, directeur technique ;

  • Sid Ahmed Bouceif, coordinateur général.

Ces trois hommes ont mis en place une méthode aussi cynique qu’efficace. Leur recette : fabriquer de faux besoins et recycler les fonds à travers des circuits complices.

  1. Création de fausses études : ils sollicitaient les maires pour exprimer des besoins artificiels — souvent des études sans utilité réelle — dans le seul but de débloquer les budgets. Ces études, rarement réalisées ou pertinentes, servaient de prétexte pour justifier les décaissements.

  2. Réseau de bureaux d’études et d'entreprises complaisants : les marchés étaient attribués de manière systématique aux mêmes entités. Derrière les procédures formelles, se cachent des montages où études, contrôles et travaux étaient instrumentalisés au profit direct du trio.

Pire encore : la majorité des études étaient sous-traitées au bureau TMT — acronyme de Toutou Mint Taghi, l’épouse de Saad Bouh.  Une preuve flagrante du sentiment d'impunité que ce dernier a acquis ainsi que népotisme et de la dérive morale qui gangrènent ce projet censé servir les citoyens. 

Au lieu de renforcer la décentralisation et d’améliorer les conditions de vie dans les villes intermédiaires, MOUDOUN est devenu le symbole d’un système opaque et impuni, où les intérêts personnels écrasent l’intérêt public.

Malheureusement, le mal est déjà fait : les 71 millions ont quasiment été dilapidés. À la suite du contrôle de l’IGE, le coordinateur a été relevé de ses fonctions. Toutefois, le problème est bien plus profond : tant que Bouhebeyni et Saad Bouh resteront au cœur du dispositif, le dysfonctionnement ne pourra que se prolonger.

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